Partage d’une expérience humanitaire au TOGO

Pascale Lefuel le 14 novembre 2022

Infirmière depuis 1972, je suis retraitée depuis 1 an. J’ai toujours travaillé, dans des domaines différents, dont 25 ans en Néphrologie aux Hôpitaux Universitaires de Genève. Une dernière expérience me manquait pour boucler ma carrière : J’avais très envie d’effectuer une mission humanitaire en Afrique.
En touriste, j’avais déjà voyagé plusieurs fois en Afrique subsaharienne et toujours je me promettais d’y retourner pour aider la population. A mon petit niveau, je pouvais peut-être encore me rendre utile. Et c’est en Juillet dernier que j’ai pu concrétiser ce souhait avec l’ONG qui s’appelle APSEDA (Aide Pour le Soutien Aux Enfants Démunis d’Afrique) Je suis donc partie 3 semaines au TOGO. Après avoir réussi un financement participatif (Voir un-echographe-pour-le-togo) j’ai pu acheter, grâce à une centaine de donateurs, et offrir un échographe qui manquait cruellement à un dispensaire rural. J’ai été très bien accueillie au village de Kébo Toé près d’AGOU à 150 km au nord de la capitale du Togo qui s’appelle LOME.

Bernadette avec un soignant au centre d'échographie ventre d'une future maman avec l'échographe

Je suis restée 18 jours sur place où j’ai pu travailler avec l’infirmier responsable du dispensaire et la sage-femme. L’échographe installé est fonctionnel et les femmes de Kébo Toé peuvent maintenant voir leur bébé sur l’écran avec beaucoup d’émotion.  S’il y a le moindre doute sur le développement de l’enfant ou sur des complications possibles, la patiente est référée dans un hôpital en ville.

Mon travail terminé, je ne voulais pas quitter le TOGO sans visiter le service d’hémodialyse de l’hôpital de Lomé. Ce que j’ai pu faire grâce à l’entremise de l’ONG. Il faut déjà savoir qu’au TOGO, à part les fonctionnaires de l’état qui peuvent bénéficier d’une assurance maladie, la majeure partie de la population n’a pas d’assurance et ils doivent payer leurs soins. La dialyse coûte très cher. Il faut en outre ajouter que toutes les autres dépenses liées aux traitements tels que les médicaments antihypertenseurs, l´héparine, l´érythropoïétine et le fer injectable sont également à la charge des patients.
Le salaire minimum au Togo (SMIG) est fixé à 35.000 F CFA, soit 53 Euros. Ce qui est presque le prix d’une dialyse.

Il existe une clinique privée à Lomé qui effectue des dialyses. Elle est réservée à une clientèle fortunée et je ne l’ai pas visitée. Par contre, grâce au représentant de l’APSEDA, j’ai pu visiter le centre d’hémodialyse du CHU Sylvanus Olympio , hôpital public de Lomé. J’ai d’abord été très surprise en voyant un service très grand avec du matériel moderne. Une salle de traitement de l’eau est sous la responsabilité d’un ingénieur. Ils ont une quinzaine de générateurs à peu près identiques aux nôtres en Suisse et en France. J’ai tout reconnu….les mêmes bidons, les mêmes cartouches de bicarbonate , mêmes filtres et mêmes fauteuils. Les patients sont dialysés par une fistule ou par un cathéter tunnelisé. La moyenne d’âge des patients est de 50 ans, donc beaucoup plus jeune que chez nous.

D’après l’ Article Insuffisance rénale chronique et hémodialyse à Lomé (journal Panafrican) Les causes principales de l´IRC sont : l´HTA, le diabète, la polykystose rénale, la consommation de médicaments traditionnels, le VIH.

photo du centre de dialyse de Lomé

80 patients sont traités dans ce centre. Ils dialysent huit patients chroniques au maximum en même temps le matin, ainsi que l’après-midi, car ils ne sont que deux infirmières ou infirmiers sur 12h30 de travail. Pas d’aides-soignants. Seule une femme de ménage les aide chaque jour. La majorité de leurs patients ne dialysent que 2 fois par semaine pour limiter les coûts.

photo de Bernadette parlant à un patient en cours de dialyse avec un soignant

J’ai eu la chance de pourvoir discuter un moment avec une patiente pendant qu’elle dialysait. Une femme de 36 ans, en dialyse depuis moins d’un an. En IRT sur maladie hypertensive, elle effectue 2 séances de 4 heures par semaine. Elle ne reçoit pas (ou très peu souvent) d’Erythropoïétine car elle ne peut pas la payer. Elle est toujours fatiguée. Sa famille se cotise pourtant pour l’aider. Elle sait que la transplantation rénale n’existe qu’exceptionnellement au TOGO et exprime qu’elle n’aura pas cette chance. Elle sait aussi que ça va devenir très compliqué pour elle quand elle n’urinera plus. Elle a 2 enfants et espère vivre encore pour les voir grandir…

 

Les contraintes pour une meilleure prise en charge (selon l’article L’hémodialyse en Afrique, Centre de dialyse au Togo | CADES (cadesmedical.fr)

  • L’insuffisance du plateau technique responsable du faible rythme des séances. Dans le public, la dialyse est subventionnée à 105 euros.
  • La référence tardive des patients en hémodialyse.
  • Le faible pouvoir d’achat des patients responsable de la mauvaise observance de l’hémodialyse.
  • La proportion élevée des patients porteurs de CVC comme voie d’abord pour l’hémodialyse.
  • La mauvaise alimentation et la consommation de sel.

Un immense merci à Bernadette pour le partage de cette magnifique mission humanitaire.

 

Publié par Pascale Lefuel

Infirmière spécialiste clinique de néphrologie.

10 commentaires

  1. chapeau madame, nous en France nous avons la chance d’être pris en charge par la sécu, sommes en attente d’une greffe d’un rein tout cela gratuitement et on se plaint que cela ne va pas assez vite, et ces pauvres gens qui souffrent dans le silence, nous voyons nos gouvernements qui donnent des milliards pour des riches et laissent ces pauvres gens dans des conditions primitives c’est honteux, mais grâce à des personnes comme vous ils ont un peu de survie bravo à vous

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    1. Bernadette Gombert 14 novembre 2022 à 19 h 44 min

      Merci beaucoup mais en effectuant cette mission j’ai aussi beaucoup appris sur les maladies tropicales que je ne connaissais pas ou si peu…Les gens là-bas m’ont apporté tellement d’humanité et de gentillesse que je suis rentrée plus riche…

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  2. Ponard Ravanel Dominique 14 novembre 2022 à 16 h 46 min

    Bravo Bernadette. Quelle belle expérience! Quel plaisir aussi d’avoir de tes nouvelles via l’Afrique !!
    Amicalement
    Dominique

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    1. Bernadette Gombert 14 novembre 2022 à 19 h 47 min

      Merci Dominique ! Notre collaboration aux HUG pendant de nombreuses années est un excellent souvenir . Tu m’as soutenue dans mes projets. Grâce aussi, j’ai appris.

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  3. Bravo Bernadette, je suis super fier de ce que tu as faits

    Génial et merci du partage

    Thomas

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  4. Brigitte CASSAGNES 16 novembre 2022 à 9 h 14 min

    Bravo Bernadette et merci pour ce témoignage ,à quand le prochain voyage?
    Brigitte .

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  5. Bonjour merci pour cette belle expérience et témoignages.Tous ces difficultés ce n’est pas parceque l’Afrique est pauvre non c’est une manque de volonté causer par nos dirigeants qui sont des voleurs, des criminels Ils ne méritent aucune respect. Bravo bonne continuation. Cordialement

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  6. Emeline CHARLES 3 mars 2023 à 21 h 02 min

    Bonjour
    Merci pour votre témoignage ! Je fais parti d’un groupe d’étudiants infirmiers qui devrait partir en humanitaire. Serait il possible d’échanger ?

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  7. Emeline CHARLES 6 mars 2023 à 9 h 33 min

    Bonjour !
    Bravo pour votre engagement et votre réussite !
    Nous sommes un groupes d’étudiants infirmiers et nous souhaitons partir en stage humanitaire avec APSEDA. Serait-il possible de d’échanger avec vous ?

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    1. Pascale Lefuel 6 mars 2023 à 9 h 37 min

      Bonjour Emeline, j’ai demandé à l’auteure du témoignage de vous contacter en privé. Tous mes voeux de réussite pour votre stage humanitaire.

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